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Sunday, August 2, 2020

Provence : les marchés nocturnes, dernier espoir des artisans - Le Point

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Les soirs d'été, les marchés nocturnes de Provence se remplissent des étals d'artisans en tout genre. Sur les ports de la Méditerranée ou dans les ruelles provençales, c'est l'heure où les passants déambulent entre les savons artisanaux colorés, les vieux livres, les odeurs de nougat et de macarons, les sacs et le tintement des bijoux faits main. Le tout sous le ciel étoilé du sud de la France. Mais cette année, l'atmosphère est un peu différente. Morose même, diront certains.

La majorité des artisans a constaté une baisse de la fréquentation des marchés nocturnes, notamment en semaine, où certains regrettent parfois de venir. Le manque de touristes a profondément affecté leur activité, et la population locale ne peut pas combler ce vide. Certains se plaignent aussi des mesures de sécurité, et avant tout du port du masque, qui, selon eux, ne font que compliquer la vie des clients. L'ambiance n'est donc pas à la fête.

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Les mairies au chevet des commerçants

Pour faciliter la vie des artisans et créateurs, la ville de Martigues a décidé de mettre en place un système d'inscription « à la carte », qui ne les oblige pas à être présents toutes les semaines : « C'est très aléatoire, ils viennent quand ils peuvent », explique la représentante de la mairie. « Le concept a un peu changé », ajoute-t-elle, notamment concernant les sens de circulation, afin d'obtenir un espace plus ouvert et de favoriser la fluidité des passants. Le nombre d'exposants a été réduit à une vingtaine, pour « un marché plus qualitatif », affirme la commune. À Fos-sur-Mer, le nombre d'exposants a également été réduit, passant d'environ 35 à une vingtaine. Et la priorité a donc été donnée aux plus anciens. La taille des stands a également été limitée à cinq mètres pour respecter au mieux la distanciation sociale. La fréquentation est évidemment en baisse, surtout la semaine, avec un public beaucoup plus local, explique l'office de tourisme. Qui ajoute que la priorité reste de « faire travailler les commerçants ».

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D'autres municipalités ont fait le choix d'agrandir l'espace du marché, afin d'accueillir toujours le même nombre d'exposants tout en respectant la distanciation sociale. C'est le cas à Sanary-sur-Mer, où, là encore, on dit vouloir faire travailler les artisans, pour les aider à gagner leur vie. À Salon-de-Provence, le nombre d'exposants est même en hausse. Les marchés, et notamment les marchés nocturnes, sont en effet parmi les seuls événements à avoir encore lieu. Les artisans viennent donc de loin pour y travailler.

Les artisans touchés de plein fouet

Pauline Ber, créatrice de Saule Cosmétique, est venue sur le marché nocturne de Salon-de-Provence pour la deuxième année consécutive. La jeune femme, basée à Carpentras, a créé une gamme de produits cosmétiques naturels, qu'elle a décidé de vendre sur quatre marchés des Bouches-du-Rhône cet été. Elle espère ainsi rencontrer des clients et les fidéliser en les orientant ensuite sur son site. Mais elle constate, déçue, que le nombre de visiteurs a nettement baissé et qu'ils se font plus timides dans leurs achats. « Ils achètent moins, le panier moyen est moins important. » Même constat pour Sabrina Labado, créatrice de bijoux : « Certains de mes clients ne sont pas venus du tout parce qu'ils ont peur de sortir ». « Beaucoup d'événements ont été annulés, ajoute-t-elle, alors on essaye de combler ce manque en cherchant toutes les opportunités possibles, des boutiques éphémères par exemple. » Heureusement, il lui reste les commandes via son site Internet, « pour sauver les meubles ».

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Frane Pannetier, basée à Arles, dirige l'entreprise qui porte son nom : Les Macarons de Frane. Elle fabrique en gros et fournit des macarons et d'autres gourmandises à de nombreux salons, foires et festivals. Mais avec l'annulation de beaucoup de ces événements, les marchés nocturnes font office de dernier recours : « C'est catastrophique, tout est annulé, il ne reste que ça. » Elle estime avoir perdu 80 % de son chiffre d'affaires par rapport à l'année dernière. Et sa production est passée de 500 à 30 kilos par semaine.

À Saint-Rémy-de-Provence, le marché nocturne des créateurs du mardi soir « n'a rien à voir par rapport à l'année dernière », admet l'office de tourisme des Alpilles. Le public a changé : beaucoup plus de Français, quelques Belges et Allemands, et plus aucun Américain, très présents l'année dernière. « Il n'y a pas de touristes ! » s'exclame Valérie Beauquis, créatrice de sacs et de bijoux, pour qui les marchés d'été représentant la moitié de son chiffre d'affaires. Elle s'est aussi rendu compte que beaucoup de vacanciers viennent sur une courte période, rarement plus d'une semaine, et ont un budget plus limité. Les quelques événements auxquels elle a pu participer l'obligent à faire beaucoup de kilomètres. Basée à Nîmes, elle se rend régulièrement dans le Vaucluse, les Bouches-du-Rhône ou le Var. Bref, beaucoup de déplacements pour essayer d'avoir quelques rentrées d'argent.

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Espoirs et frustrations

Pendant le confinement, Pauline, Valérie, Sabrina et Frane ont pu compter sur l'aide accordée aux indépendants, d'un montant de 1 500 euros, jusqu'en juin. Malgré tout, Pauline sait qu'elle n'aura « pas de salaire cette année », explique-t-elle, un peu dépitée. Elle reste quand même optimiste : « On gagne moins, mais on s'en sort, et on est contents d'avoir recommencé à travailler. » Frane est plus critique : cette somme lui a permis de couvrir certains frais, mais reste insuffisante à son goût. Et d'ajouter : « Il y a trop de restrictions. » Si bien qu'elle a vu plusieurs de ses collègues décider de changer de carrière, pour prendre « des boulots fixes ».

Mais tous ne sont pas mécontents. Lucie Bidart, créatrice d'articles zéro déchet, est plutôt satisfaite de son confinement. Couturière, elle a été très occupée par la fabrication de masques, en plus des commandes passées par quelques clients. « Je pensais que ça allait être la cata, mais je suis contente. Les masques ont bien aidé aussi. Et ça fait plaisir de travailler dans ces conditions. » Cet été, elle participe au marché nocturne de Saint-Rémy-de-Provence, où elle se dit également satisfaite de la situation. Avant d'ajouter : « C'est une année particulière. Il y a une petite tension chez les artisans par crainte de ne pas gagner assez d'argent, et chez les clients, qui ont parfois peur à cause du Covid. » Et si Valérie Beauquis trouve désagréable le port du masque en période de fortes chaleurs, elle veut éviter le relâchement pour ne pas avoir à subir une nouvelle période de crise. D'autant que les artisans commencent déjà à s'inscrire pour les marchés de Noël : « Il faut être responsable, ou beaucoup d'entreprises devront mettre la clé sous la porte. »

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August 02, 2020 at 03:30PM
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